Après délibération, le Jury du Prix d’Histoire Sociale, attribué par la Fondation Mattei Dogan & la Fondation Maison des Sciences de l’Homme, a proposé pour le prix de l’année 2019 ex-æquo les thèses suivantes :

Julie Marquet, Droit, coutumes et justice coloniale. Les affaires de caste dans les Etablissements français de l’Inde, 1816-1870 , (Paris Diderot, 2018)
Ariane Mak, En grève et en guerre. Les mineurs britanniques au prisme des enquêtes du Mass Observation (1939-1945) , (EHESS, 2018)
Julien Carenton, Les fabriques de la « paix sociale ». Acteurs et enjeux de la régulation sociale (Grenoble, 1842-1938) , (Université JFC, 2017)
Le jury a souligné la qualité exceptionnelle des candidatures présentées à l’édition 2019 du prix.

Julie Marquet, docteure du laboratoire ICT, a obtenu le prix d’histoire sociale pour sa thèse soutenue en 2018, sous la direction de Mme Marie-Noëlle Bourguet et Pierre Singaravélou.

Résumé de thèse :

Tout au long du XIXe siècle, le gouvernement des Établissements français de l’Inde promet de respecter les us et coutumes des Indiens. Il s’engage notamment à juger les habitants de ses établissements suivant ces us et coutumes. Il forge ainsi une catégorie juridique pour désigner les conflits coutumiers pris en charge par la justice coloniale : les « affaires de caste ».Cette étude des affaires de caste contribue aux développements récents des recherches d’histoire impériale et coloniale sur la formation du droit. Elle rejoint les travaux actuels qui remettent en cause l’idée que le droit colonial est imposé par le haut, suivant une logique rationnelle, et montrent qu’au contraire, il est le fruit de compositions avec les formes juridiques précoloniales et les possibilités locales. La thèse étudie spécifiquement les processus de composition à l’œuvre dans le façonnement du système juridique en matière de caste. Le système juridique, entendu comme l’ensemble des règles de droit, les institutions chargées de les appliquer et les usages de ces institutions, est envisagé dans son rapport aux demandes sociales. Cette approche localisée de la situation coloniale apporte de plus un éclairage nouveau sur la société indienne dans le sud du sous-continent. Elle participe ainsi au débat sur la constitution des castes comme unité sociale et comme catégorie administrative à la période coloniale. Le système juridique est examiné sous différents angles. Dans un premier temps, la focale est placée sur les cadres coloniaux des affaires de caste et les modalités d’expression de la souveraineté du gouvernement colonial. Dans un second temps, l’attention est tournée vers les différents acteurs de la résolution des conflits, qui participent au façonnement de ces cadres. Pour finir, l’étude s’arrête sur la forme et les enjeux des litiges, de manière à saisir le rôle des justiciables dans la production des normes sociales et juridiques.